L’Afropreneuriat, une manifestation moderne de la négritude ? Focus sur le marché de la beauté noire

Connaissez vous la négritude ?

Ce mouvement initié par des intellectuels noirs francophones comme Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor ou encore Léon Damas  a pour objectif de célébrer les différentes cultures noires. La négritude, c’est également revendiquer sa fierté d’être noir et donc africain ou afrodescendant.

Une réponse au racisme auquel les “nègres” ont dû faire face tout au long de l’histoire et qui a, encore aujourd’hui des conséquences psychologiques et socio-économiques sur les afro-descendants.

Ce mouvement, né dans l’entre-deux guerres prend essence dans la littérature notamment grâce à la poésie car pour Aimé Césaire, la littérature est le meilleur moyen de faire prendre conscience aux noirs de la richesse de leur héritage culturel.

Aimé Césaire définissait la négritude comme “une condition sine qua non d’authenticité de la création dans quelque domaine que ce soit”. 

Une définition qu’on peut facilement associer aux afropreneurs,  ces entrepreneurs afro-descendants ou d’origine africaine qui ont décidé de faire de leur identité, une force pour leur entreprise.

En France, nombreux sont les entrepreneurs afro-descendants qui entreprennent dans le marché Afro.

La plupart des raisons évoquées par les entrepreneurs qui investissent ce marché sont liés de près ou de loin à des questions identitaires (notamment sur l’identité « noire »)

 

 

Le marché de la beauté noire

Le marché de la beauté noire est probablement le marché le plus investi par les afrodescendants. Et pour cause, la beauté noire est un sujet extrêmement sensible dans la communauté africaine.

La peau noire et les cheveux crépus ont tant été dévalorisés qu’ils sont, encore aujourd’hui, sources de souffrance au sein de la communauté noire.

Porter ses cheveux crépus au travail était quasiment impossible il y a quelques années, le cheveu crépu jugé “non professionnel” ou “non esthétique” n’avait pas sa place dans l’espace public ni même dans les programmes scolaires du CAP coiffure.

Ainsi, le défrisage chimique (soit le fait de lisser durablement les cheveux crépus) est entré dans les habitus des personnes noires.

Aujourd’hui, la tendance tend à s’inverser avec l’arrivée du mouvement “nappy”.  Né aux Etats-Unis, il arrive en France dans les années 2000, ce mouvement  consiste à arrêter le défrisage chimique pour adopter les cheveux naturels crépus.

Avec ce mouvement, de nombreuses initiatives et de nombreuses marques ont fait leur apparition.

Il en est de même pour la peau noire, l’éclaircissement chimique de la peau est une pratique courante que ce soit en Afrique ou ailleurs.

Ainsi, on constate qu’au-delà d’une simple question esthétique, le marché de la beauté noire implique de nombreuses questions identitaires qu’il est important de prendre en compte quand on décide de se lancer dedans.

J’ai rencontré Ghana Elin, une jeune femme qui a créé les Ateliers Crépus dans le but d’aider les femmes noires à prendre conscience du potentiel de leurs cheveux naturels crépus.

“Je suis entrée dans ce projet avec une vision purement esthétique, j’étais dans le métro lorsque j’ai constaté que la majorité des femmes noires portaient des perruques, des tissages et tout. Et c’est là que je me suis dit « ah bah peut-être qu’elles ne savent pas faire avec leurs cheveux naturels. C’est là que je me suis dit que  j’allais lancer un projet dans ce sens. C’est en avançant dans le projet, en creusant vraiment que je me suis rendu compte de la souffrance que pouvait représenter le fait d’avoir des cheveux crépus. Et les complexes qu’elles peuvent avoir et qui sont partagés par beaucoup. En fait,  j’ai constaté que la majorité des femmes noires ont,  à un moment ou un autre, eu honte de leurs cheveux crépus. 

Ghana Ellin, Fondatrice des ateliers crépus

Décider de créer une marque dédiée aux cheveux crépus, ce n’est plus simplement répondre à une demande, c’est également s’engager auprès des femmes noires en leur proposant un produit qui RESPECTE son cheveu.

Je m’appelle Alexia Ewane, CEO de l’agence Omulema, chercheuse spécialisée sur l’afropreneuriat et le marché Afro, j’accompagne les entrepreneurs qui exercent dans le domaine de la mode, de la beauté, du bien être dans leur stratégie de marque.